28                           HISTOIRE DE LA TAPISSERIE
ainsi que nous l'avons établi, avant l'année 1400, il est à supposer qu'au moment de sa grande faveur il avait atteint un certain âge ; sa naissance pourrait remonter ainsi aux environs de 1330 ou de 1340.
En 1375, Bataille semble attaché à la personne et à la fortune du duc d'Anjou, l'ainé des frères de Charles V. On connait la passion de ce prince pour les joyaux, les riches pièces d'orfèvrerie, les ob­jets d'art de toute nature. Mais, si on possède l'inventaire détaillé de ses joyaux, on n'a pas celui de ses tapisseries, et c'est grand dom­mage, car il en avait certainement réuni une rare collection. Pat-quels moyens se procura-t-il les ressources nécessaires pour amas­ser de pareils trésors, c'est ce que nous n'avons heureusement pas à examiner ici. Toujours est-il que le duc Louis Ier d'Anjou passe ajuste titre pour un des connaisseurs les plus raffinés de son temps.
Dès l'année 1375, et c'est la plus ancienne date des comptes du duc d'Anjou, nous trouvons Bataille installé sur un pied d'intimité chez son noble patron. Il porte le titre de valet de.chambre du duc, preuve évidente de la faveur dont il jouit à la petite cour d'Angers.
Les payements qui lui sont faits atteignent, dès le début, des chiffres bien supérieurs à ceux que nous avons rencontrés jusqu'ici pour des dépenses analogues. C'est par acomptes de trois cents, de six cents, de huit cents francs que le duc.se libère envers son tapissier attitré. Entre - temps il réclame de son valet de chambre des services d'une autre nature.
Lé duc Loiiis achète d'un de ses gentilshommes un cheval, et c'est Nicolas Bataille qui se porte caution du payement du prix. Il pouvait difficilement refuser cette onéreuse marque de confiance. Ce fait ne jette-t-il pas une vive lumière sur Ia faveur du tapissier valet de chambre?
Les payements se succèdent à dates assez rapprochées. Le 7 juin 1376, .Bataille reçoit en une seule fois 1,600 francs, dont 1,000 « pour un grand tappiz de haute lice à ymages où est VHistoire d'Hector ». Dans le même article se trouve comprise, avec di­verses autres fournitures, une tapisserie des Sept Complétions, c'est-à-dire des sept tempéraments, représentant sans doute le Colère, le Bilieux, le Flegmatique, etc.
La mème année, notre maitre tapissier travaille pour le comte de Savoie, Amédée VI, dit le comte Verd. Le souverain de la Sa­voie n'était pas un étranger à la cour de France ; son mariage avec Bonne de Bourbon avait créé de fréquentes relations entre le comte